Crédit: Article adapté d’une publication originale sur le site de l’EPFL, les textes, les images et les vidéos sont sous licence CC BY-SA 4.0
Un chercheur de l’EPFL a développé un modèle mathématique qui optimise les échanges de chaleur dans les usines et réduit drastiquement la consommation en eau ainsi qu'en énergie. En appliquant son modèle à une entreprise de pâte à papier canadienne, il est parvenu à diminuer théoriquement la consommation d’eau de près de 60%, tout en produisant jusqu’à six fois plus d’électricité.
Pour produire les biens de consommations usuels, les industries utilisent de larges quantités d’eau, de chaleur et d’électricité. Ce qui engendre des émissions de CO2 conséquentes et un impact environnemental marqué. Lors de la COP21 de Paris, il a été établi que les industries pouvaient jouer un rôle majeur pour combattre le dérèglement climatique en réduisant leur empreinte carbone.
A l’EPFL, Maziar Kermani, du groupe Industrial Process and Energy Systems Engineering (IPESE), dirigé par François Maréchal, a mis au point un modèle mathématique pour réduire la consommation en eau et en énergie des procédés industriels.
L’idée consiste à récupérer l’énergie et la chaleur perdues à toutes les étapes de la production, puis à les réinjecter dans le système. En parallèle, il propose de produire un maximum d’électricité, en introduisant des techniques de bioraffinerie, mêlant turbines et fluides «organiques».
En appliquant son modèle à une usine de pâte à papier canadienne, Maziar Kermani est parvenu à réduire de manière théorique la consommation d’eau de l’entreprise de près de 60 %, la faisant passer de 820 kilos d’eau par seconde, à environ 230 à 300 kg/s. La production excédentaire d’électricité a de son côté été multipliée par un facteur 6, passant de 3 à environ 20 megawatts. La recherche est parue dans le journal Energies.
Entre autres choses, le chercheur préconise l’introduction de procédés à base de fluides organiques. Les fluides organiques ont l’avantage de se transformer en vapeur à haute pression à des températures relativement basses (250°C). «Grâce à eux, on pourrait utiliser l’eau chaude récupérée ainsi que les chaleurs à basse et moyenne température au préalable pour fabriquer la vapeur requise», assure le chercheur. Ce modèle devrait être applicable à n’importe quel type d’entreprises.
Du côté de l’entreprise canadienne choisie comme modèle dans ce travail, les pistes semblent intéressantes. Marzouk Benali, spécialisé dans l’optimisation des procédés industriels au Canada et chargé d’optimiser les procédés de cette entreprise en particulier, explique : « Comparé aux méthodes purement mathématiques ou limitées, cette approche complète présente des informations judicieuses pour la conception de réseaux d’échange de chaleur», indique-t-il.
Pour tester son modèle, le chercheur a choisi de s’attaquer au procédé de fabrication kraft, qui domine le secteur et qui fixe les étapes pour la transformation de copeaux de bois en pâte à papier.
Ces granulés de bois subissent des opérations d’humidification, de cuisson (dans des réacteurs à biogaz), de blanchiment , de séchage et de lavage. De larges quantités de vapeur sont produites. Elles sont utilisées pour chauffer certains procédés et fournissent, grâce à des turbines, la totalité de l’électricité nécessaire au fonctionnement de la fabrique, ainsi qu’un excédent, qui peut être vendu.
Mais le système actuel n’est de loin pas optimal, selon Maziar Kermani. «L’absence de connexion entre toutes les étapes induit un énorme gaspillage en eau et en énergie, assure-t-il. On utilise par exemple de l’eau froide pour laver et refroidir la pâte, puis on jette cette eau, sans profiter de la chaleur qu’elle a emmagasinée. En parallèle, on brûle de la «liqueur noire» à de très hautes températures (environ 1200 °C), pour créer de la vapeur. Cette vapeur permet certes de produire de l’électricité et de chauffer d’autres procédés. Mais le coût énergétique est trop haut.»
Crédit: Article adapté d’une publication originale sur le site de l’EPFL, les textes, les images et les vidéos sont sous licence CC BY-SA 4.0